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Le nord et L’ouest
A notre arrivée à l’aéroport, Fred est surpris par l’aridité de l’île : Baltra ressemble à un gros cailloux assez plat et poussiéreux ; en effet, l’île a été dynamitée au début des années 1940 par l’armée états-unienne pour la construction de deux bases militaires aérienne et marine destinées à protéger le Canal de Panama suite à l’attaque de Pearl Harbor. Un bus nous emmène vers notre bateau, le Tip-Top II, stationné dans la baie du port, au milieu d’une eau turquoise. Nous faisons connaissance avec notre guide Andres et nos co-vacanciers, qui sont en majorité européens. Nous déjeunons à bord, et nous voilà partis pour notre première excursion !
Les déplacements dans l’archipel en dehors des villes sont très réglementés. Le parc national est ouvert de 6h à 18h, et toute excursion doit être effectuée avec un guide accrédité. Dans les îles, les seules promenades autorisées sont le long de sentiers balisés afin d’en minimiser l’impact sur la faune et la flore ; et pour la randonnée palmée (je vous promets que je n’ai pas inventé le mot, la preuve), seuls certains endroits sont également approuvés.
Tout comme l’île Aride aux Seychelles, les Galapagos sont un endroit magique pour observer les animaux : comme la plupart d’entre eux sont en sommet de chaîne alimentaire et que l’homme n’y a été un prédateur que pendant un court temps, beaucoup sont relativement indifférents à notre présence. Afin de ne pas les perturber, la consigne du parc est de garder une distance minimale de deux mètres ; cependant iguanes, otaries et de nombreux oiseaux n’hésiteront pas à se rapprocher soit par intérêt, soit parce qu’on se trouve sur le chemin qu’ils souhaitent emprunter !
Les premières îles que nous visitons se situent au nord de l’archipel et ont pour la plupart très peu, voire aucune végétation. À l’est de Santiago vers la baie Sullivan, nous pouvons observer la variation de couleur des diverses coulées de lave : plus elles sont anciennes, plus la couleur est claire. Au cours du voyage, nous verrons des plages de sable noir (basalte), rouge (teneur en fer importante), vert (cristaux d’olivine) et blanc (matière organique des coquillages et mollusques).
Sur la plage, les otaries des Galapagos se prélassent sans se préoccuper de nous pendant que les pélicans plongent sans gêne entre les nageurs ! En face, se trouve l’île de Bartolomé, très connue pour son roc « Pinnacle », un cône de tuf (roche poreuse légère, souvent friable, formée de dépôts volcaniques) utilisé comme cible d’entraînement par l’armée états-unienne pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Nous poursuivons notre périple avec l’île de Genovesa, qui est avec Española la plus réputée pour les oiseaux. Nous y voyons notamment les fous à pieds rouges qu’on ne reverra nulle part ailleurs dans l’archipel (ils existent sous deux morphotypes, brun et blanc qui ne font toujours partie que d’une espèce) et les fous masqués (Nazca).
Les mâles émettent un sifflement (en particulier lorsqu’ils essaient de draguer, en faisant le beau avec le bec en l’air, et les fesses et les ailes relevées) alors que les femelles cacardent. Comme ailleurs, ces oiseaux de la taille d’un gros canard nous regardent marcher à moins d’un mètre d’eux sans crainte (ce qui facilite grandement le travail du photographe naturaliste) !
Alors que nous voyons tous ces oiseaux à foison autour de nous, la recherche du hibou des marais des Galapagos requiert un travail collectif pour le repérer. Mon pari perdu avec notre guide Andres à qui le trouverait le premier m’a d’ailleurs couté une bière ! Lors du retour en zodiac, nous observons également l’otarie à fourrure, que l’on voit beaucoup plus rarement que celle des Galapagos car elle loge dans les rochers plutôt que sur la plage (on la reconnait à son nez court).
De retour sur Santiago, nous sommes accompagnés durant notre randonnée palmée par des otaries très joueuses, qui nagent autour de nous en virevoltant dans tous les sens. Très drôles, elles se comportent comme des chiens aquatiques (on en verra même une s’amuser avec un bout de bois) ! Elles sont très pataudes sur terre, mais leur dextérité sous l’eau est impressionnante. Puis la promenade en zodiac de l’après-midi nous permet de rencontrer un archevêque lisant son journal…
Le lendemain matin, nous avons la chance de voir les fous à pieds bleus pêcher en groupe au large de la pointe Vicente Roca sur Isabela ; c’est impressionnant de les voir se jeter à l’eau comme des torpilles ! C’est d’ailleurs une technique assez risquée car il arrive régulièrement qu’une collision avec un congénère ou un rocher soit fatale.
L’après-midi, nous voici à Fernandina, temps fort du voyage : l’île des dragons des mers… Nous avons regardé sur le bateau l’excellente trilogie de documentaires de la BBC sur les Galapagos, et je connais déjà la dure vie des iguanes marins. Les malheureux ont dû s’habituer à manger des algues pour compenser le manque de nourriture à terre (ce sont les seuls iguanes au monde à se nourrir dans la mer et ont les mêmes ancêtres que les iguanes terrestres des Galapagos). Les plus jeunes et les plus faibles attendent la marée basse pour brouter les algues de l’estran, mais les plus vaillants peuvent plonger jusqu’à vingt mètres de profondeur et pendant une heure pour se sustenter. Sauter dans une mer agitée au milieu des rochers est une tâche dangereuse, et les taquines otaries peuvent leur mordiller la queue pour s’amuser, ce qui ne rend pas leur affaire plus facile ! La famine semble également être un péril réel, et nous avons vu de nombreux iguanes bien secs sur les rochers (les années où El Niño s’emballe, jusqu’à 85% de la population d’iguanes marins peut disparaître).
Les iguanes étant des animaux poïkilothermes (qui ne contrôlent pas leur température corporelle) et ectothermes (leur chaleur corporelle provient de l’extérieur), ils ont besoin de la chaleur du soleil pour réguler la température de leur corps. Ils s’exposent donc au maximum sur les rochers noirs le matin, jusqu’à avoir atteint la température idéale, puis commencent à être actifs : ils peuvent perdre jusqu’à 10°C en température corporelle pendant leurs plongées sous-marines. En fin de journée ils font également le plein de chaleur, puis s’empilent les uns sur les autres pour la conserver pendant la nuit. Comme leur nourriture est trop salée pour leur organisme, ils ont développé une glande nasale qui leur permet d’éternuer de l’eau très salée, ce qui leur blanchit la tête ; cela nous a beaucoup amusés et a nécessité la quantité modique de 900 photos pour réussir à en prendre deux en pleine action (j’avais personnellement misé sur la vidéo, qui me semblait être un pari moins risqué) !
Comme si tout cela ne suffisait pas, la pauvre bête est une proie de la buse des Galapagos, qui s’attaque aux petits et aux femelles qui doivent s’éloigner du rivage lors de la ponte. L’iguane vit par contre en parfaite harmonie avec le joli crabe sally-pied-léger qui lui grimpe dessus pour manger les peaux mortes ou parasites qui y seraient installés. Le même type de rapport s’est établi entre les tortues géantes des Galapagos et certains oiseaux : lorsqu’une tortue voit un oiseau près d’elle et souhaite se faire « nettoyer », elle se hisse le plus haut possible sur ses pattes et tend le cou vers le haut, puis l’oiseau se met à picorer tout ce qui la dérange. Ces deux animaux ont une espérance de vie hors du commun : les iguanes peuvent vivre jusqu’à 60 ans et les tortues jusqu’à 200 ans (c’est une estimation car il n’y a pas suffisamment d’historique les concernant) !
Notre promenade en zodiac du lendemain nous révèle les manchots des Galapagos et le morphotype jaune de la tortue verte du pacifique, bien plus joli que l’original ! Nous voyons également des cormorans aptères, espèce endémique qui a perdu l’usage de ses ailes et dont les yeux turquoises sont étonnants.
Chaque jour nous avons en moyenne deux randonnées palmées et deux promenades à terre ou plus rarement en zodiac. Lever à potron-minet, petit-déj à 7h, et embarquement sur le zodiac à 8h ; en général nous passons 1h30 à terre, puis retour au bateau et enfin 45 minutes de natation ; déjeuner à 12h, sieste (sauf les jours de sortie kayak), puis à nouveau snorkeling et sortie d’1h30 en fin de journée, et enfin diner à 19h ; tout cela réglé comme du papier à musique ! Contrairement à ce qu’on avait imaginé, ce ne sont pas des vacances reposantes. La nourriture très saine et les 1h30 de natation dans de l’eau froide chaque jour (avec des combinaisons de plongée de 3mm quand même) sont plutôt revigorantes !
En face du port d’Isabela, une excursion très matinale nous mène le long d’un couloir de mer naturel formé dans la roche, utilisé comme salle de sieste par les requins-corail ; c’est assez amusant de les voir tous entassés au fond, alors que d’autres rodent au-dessus.
Nous marchons ensuite jusqu’au bord de la caldeira du volcan Sierra Negra, ce qui est enfin l’occasion de découvrir une véritable végétation aux Galapagos ; nous n’avons vu que de la Tiquilla nesiotica et des cactus de lave (plantes résistant à la sécheresse) ou au mieux de la mangrove jusqu’ici !
Nous apprécions le petit village de Puerto Villamil, fort charmant et certainement un lieu très agréable où passer quelques jours. Comme partout ailleurs dans l’archipel, les otaries se sont bien appropriées les constructions humaines !
Nous arrivons à la fin de notre première semaine, et nous nous demandons si cela valait le coup de réserver deux semaines de croisière (nous serions bien restés quelques jours à Puerto Villamil à se prélasser sur le bord de la mer, dans cette ambiance relax) mais la plupart des îles étant inaccessibles autrement qu’en croisière de plusieurs jours, nous serons finalement très contents d’avoir continué car les îles suivantes (surtout les paysages) se révèleront très différentes de ce que nous avons vu jusque-là.